Je viens de me rendre compte que, si je vous ai déjà parlé de ce roman fantastique déjanté en format kindle (également téléchargeable sur pc, androïd, iphone, etc., le tout à partir d'amazon.fr et pour une somme honteusement modique^^), je ne vous en ai jamais livré d'extrait : il était temps de réparer cette injustice !
Comme je ne savais pas quel passage vous montrer, j'ai fait défiler les pages au hasard et il en est sorti le voyage d'Avril et Scot vers un cimetière indien :
"Nous fîmes le reste du chemin
en silence, ballottés au gré des accidents du terrain caillouteux. Nous
montions continuellement vers des affleurements rocheux dont la masse anguleuse
dominait les environs. La piste zigzaguait en une suite de lacets en épingle
qui, peu à peu, nous élevaient au-dessus des plaines : il ne faisait pas bon
s’endormir au volant, dans le coin, à moins de vouloir reprendre les recherches
de Newton par la fin.
Je remarquai que de jeunes
arbres avaient poussé dans certains virages, côté paroi, là où l’abri du vent
avait favorisé leur croissance : marrant comme les plantes arrivent à
pousser dans les endroits les plus hostiles, me dis-je.
Nous grimpâmes jusqu’au pied du
promontoire, où l’on devinait de frêles structures de bois.
«C’est ça ? »,
m’étonnai-je. L’architecture des tombeaux était on ne peux plus
décevante : cela tenait plus de l’échafaudage en bambou que du
mausolée !
«Tu t’attendais à
quoi ? », railla l’Indien, «Des pyramides ? » .
«Non, mais, sans aller
jusque là, j’avais imaginé quelque chose d’un peu construit, je ne sais pas,
moi, un truc solide ? » .
Avril haussa les épaules :
«Nos dépouilles ne sont pas éternelles, à quoi servirait que nos tombes le
soient ? »
«C’est pas faux… »,
convins-je.
Puis, Avril coupa droit au cœur
des tombes. Je dois avouer que je ne le suivis qu’avec réticence : j’ai
beau être terre à terre, je ne me sentais pas à l’aise dans cet endroit
lugubre, à l’écart de la civilisation, surtout en compagnie d’un mec qui
prétendait voir des spectres. Non que je crus un seul instant à ces histoires
de revenants, mais là, dans cet environnement, je dois bien admettre que le
champ des possibles me paraissait soudain plus étendu.
«Tu… tu en vois, là ? »
«Quoi ? », me
demanda-t-il sans même se retourner.
«Ben, tu sais bien, des… »
: je n’osai dire le mot ici, comme si le simple fait d’en parler risquait
de donner corps à ses divagations.
Avril se retourna : «Des
fantômes ? »
«Oui, oui, voilà »,
convins-je en jetant des regards autour de nous.
Il fit de même et haussa les
épaules : «Non : c’est dégagé. »
Nous reprîmes notre marche.
«Et c’est pas bizarre, ça,
de voir des… d’en voir en ville et pas dans un cimetière ? »
«Ben, non, si tu y penses
bien, c’est tout à fait normal »
«Ah ? »
: un jour, il faudrait qu’on parle du sens du mot «normal », tous
les deux…
«Tu vois… »,
commença l’emplumé, « … c’est un peu comme dans un hôtel : les
clients satisfaits, tu les vois jamais râler à l’accueil ! Y’a que les
insomniaques qui hantent les couloirs ! »
Pas faux, là non plus…"